Carlos SAINZ
 C.SAINZ
McLaren Renault
Pierre GASLY
 P.GASLY
AlphaTauri Honda
Lance STROLL
 L.STROLL
Racing Point BWT Mercedes

1026o Gran Premio

XCI Gran Premio d'Italia
Soleado
Monza
domingo, 6 de septiembre de 2020
53 vueltas x 5.793 km - 306.720 km
(Offset: 309 m)
info
Carrera interrumpida en la vuelta 26 debido a un accidente.
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F1
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De Renault à Alpine

 

Dernier Grand Prix des Williams

Jeudi 3 septembre 2020, une page de l'histoire de la Formule 1 se tourne définitivement avec l'annonce du retrait de Frank Williams et de sa fille Claire de la direction de leur équipe. Le nouveau propriétaire, le fonds d'investissement états-unien Dorilton Capital, entame une restructuration de grande envergure. Claire Williams, qui présidait aux destinées du team depuis 2013 avec le titre de directrice ajointe, annonce un départ volontaire, mais tout le monde comprend qu'il s'agit d'un débarquement en bonne et due forme, du reste attendu et sans aucun doute convenu dès la conclusion de la vente. Mike O'Driscoll, PDG de Williams Grand Prix Engineering depuis 2011 et homme de confiance des Williams, est aussi évincé. Après ce GP d'Italie, l'écurie sera administrée par un triumvirat comprenant Darren Fultz, Matthew Savage, respectivement CEO et président de Dorilton Capital, et James Matthews, PDG d'Eden Rock Group, un groupe d'investissement basé à Londres. Ce dernier est aussi un ancien coureur automobile et accessoirement l'époux de Pippa Middleton, donc le beau-frère du prince William, duc de Cambridge. La presse britannique relève que Matthews est un proche de Graeme Lowdon, l'ancien directeur de l'écurie Manor, qui serait donc favori pour succéder à Claire Williams.

 

Pour l'heure, les principaux acteurs du monde la Formule 1 multiplient les hommages à l'œuvre de la famille Williams. « Je pense que Sir Frank était probablement l'une des personnes les plus honnêtes, si ce n'est la plus honnête, de la Formule 1 », déclare Lewis Hamilton. « C'est donc vraiment triste de voir la fin de ce chapitre, la fin d'un livre. Mais son héritage va survivre. » « Les Williams étaient le dernier rempart d'un passé de la Formule 1 auquel j'appartenais aussi et qui n'existe plus », souligne amèrement Giancarlo Minardi. C'est aussi le point de vue de Mario Theissen, qui fut le directeur de BMW Motorsport lorsque cette firme collaborait avec l'écurie de Grove: «La Formule 1 ne perd pas une équipe, mais une part de son cœur et de son âme. Avec Frank et Claire Williams, la dernière « équipe de garagistes » quitte la scène. »

 

Présentation de l'épreuve

Il y a un an, au soir du Grand Prix d'Italie 2019, les tifosi envahissaient par milliers la piste de Monza pour fêter la victoire de Charles Leclerc, la première d'une Ferrari à domicile depuis 2010. Il n'en sera pas de même cette année. D'une part parce que la Ferrari SF-1000 est si lente qu'inscrire un point ce week-end serait déjà pour elle un bel accomplissement. D'autre part et surtout parce qu'en raison de la Covid-19, les tribunes du légendaire autodrome resteront désespérément vides. Or sans les gradins pleins à craquer, sans les tifosi resquilleurs perchés dans les arbres, sans les immenses fanions au cheval cabré déployés dans les tribunes, les vivats à l'adresse des Ferrari, les huées au passage des Mercedes, sans la marée rouge qui engloutit le bitume après le drapeau à damiers, sans tout cela, Monza n'est plus vraiment Monza. C'est un temple vide, désert, sans souffle, sans âme. À l'image du monde ultra-aseptisé post-Covid ? Une lueur d'espoir cependant: huit jours plus tard, le Grand Prix de Toscane, qui se tiendra au Mugello, ouvrira ses portes à 3000 spectateurs, les premiers de ce championnat du monde 2020.

 

Les taquins pourront avancer que, vu le niveau affiché cette saison par les Ferrari, les tifosi ne perdront pas grand-chose à rester chez eux. Après un GP de Belgique désastreux (Vettel 13ème, Leclerc 14ème), maints observateurs avancent une opinion sur les raisons de la déchéance de la Scuderia. Parmi eux, son ancien patron Luca di Montezemolo. À peine revanchard, le ci-devant marquis juge sévèrement l'œuvre de ses successeurs: « Lors du passage à l'hybride, les gens qui dirigeaient Ferrari n'avaient ni l'expérience ni les compétences nécessaires », avance-t-il, oubliant qu'il a quitté Maranello fin 2014, soit après l'introduction de la nouvelle motorisation. Mais Montezemolo a un compte à régler avec feu Sergio Marchionne qui l'a évincé de la direction de Ferrari. Par respect, Marchionne disparaît dans sa bouche derrière le pronom « ils ». « Ils pensaient pouvoir gagner rapidement en claquant des doigts. Leur erreur la plus grossière fut de laisser partir James Allison. Puis, ils se sont fourvoyés en transférant de très bons ingénieurs des voitures de route à la F1. Mais celle-ci demande des compétences totalement différentes. » Les fautes de « ils » ne s'arrêtent pas là: « Enzo Ferrari me disait toujours que si le meilleur pilote était au Guatemala, il fallait le recruter », reprend Montezemolo. « C'est la même chose pour les ingénieurs. Or Ferrari favorise toujours les techniciens italiens. Nous devons engager les meilleures personnes sans tenir compte de leur nationalité ! » Ce que Montezemolo avait mis en pratique dans les années 1990 et 2000, lorsque Ferrari atteignit les sommets avec le Français Jean Todt, le Britannique Ross Brawn, le Sud-Africain Rory Byrne et, bien entendu, l'Allemand Michael Schumacher.

 

Comme prévu, les « modes fête », c'est-à-dire les cartographies spécialement conçues pour les qualifications, sont bannis à compter de ce GP d'Italie. Dorénavant les groupes propulseurs seront placés sous régime de « parc fermé » entre le samedi et le dimanche. La FIA, ainsi que Renault, Ferrari et Honda, espèrent par ce moyen entraver quelque peu la domination des Mercedes. Mais leurs espoirs sont minces car tous les motoristes proposaient ce type de configurations (jusqu'à neuf par unité de puissance). D'autre part, Hywel Thomas, le motoriste en chef de Mercedes, confirme que ses hommes reporteront tout simplement en course la puissance perdue en qualifications ! Enfin, il semblerait que l'équipe anglo-allemande n'utilisait pas son « mode fête » sur tous les circuits. « Qui vous dit que nous l'avons actionné à Spa ? » lance ainsi Hamilton, goguenard. Bref, ces messieurs à l'Étoile se gaussent....

 

Si les principaux volants sont attribués pour la saison 2021, quelques places demeurent disponibles en fond de grille, notamment chez Alfa Romeo. Kimi Räikkönen, bientôt 41 ans, arrive en fin de contrat avec un moral au fond des chaussettes et se dirige sans doute vers une retraite bien méritée. Son collègue Antonio Giovinazzi bénéficie pour le moment de la protection de Ferrari mais se montre toujours aussi brouillon et inconstant. L'écurie italo-helvétique pourrait bien revoir complétement son « line-up ». Nico Hülkenberg, qui a déjà piloté pour celle-ci en 2013, lorsqu'elle se nommait encore Sauber, pourrait être recruté comme pilote n°1, associé au jeune Mick Schumacher soutenu par Ferrari. Le fils du septuple champion du monde se met d'ailleurs en vedette ce week-end en remportant sa première course longue de Formule 2. Mais Schumacher II pourrait aussi se diriger vers Haas qui, selon son directeur Guenther Steiner, cherche un nouveau souffle pour 2021. Comme Alfa Romeo, l'équipe américaine souhaite renouveler sa paire de pilotes en associant un jeune espoir (outre Schumacher, le Russe Robert Shwartzman est sur les rangs) à un « vieux routier » comme Nico Hülkenberg ou Sergio Pérez. Romain Grosjean (34 ans) et Kevin Magnussen (28 ans) s'alarment en conséquence, d'autant qu'ils n'ont aucun point de chute.

 

Enfin, chez AlphaTauri, le siège de Daniil Kvyat vacille. Constamment dominé par Pierre Gasly, le Russe semble avoir épuisé sa troisième (!) et dernière chance de briller en Formule 1. Par ailleurs, Honda souhaite hisser en Formule 1 un pilote japonais: l'Empire du Soleil Levant n'a en effet plus de représentant sur les grilles depuis 2014. La firme de Wako jette son dévolu sur le jeune Yuki Tsunoda (20 ans), membre du Red Bull Junior Team, vainqueur de son championnat national de F4 en 2018 et actuellement engagé en F2 avec Carlin. Tsunoda pilotera l'AlphaTauri-Honda lors des essais de décembre à Abou Dhabi, prélude à une possible titularisation en 2021.

 

Essais et qualifications

Les Mercedes écrasent la première séance libre au cours de laquelle Bottas devance Hamilton. Verstappen endommage pour sa part sa Red Bull dans une sortie à la chicane Ascari. L'après-midi, Hamilton prend l'avantage sur Bottas tandis que les AlphaTauri surprennent en se montrant plus véloces que leurs « grandes sœurs » de Red Bull. Samedi matin, c'est Bottas qui est le plus rapide. Le Finlandais précède les deux McLaren-Renault qui paraissent très en verve ce week-end.

 

L'après-midi, et comme l'an passé, les qualifications sont marquées par la formation de pelotons en fin de séances, ce qui permet aux pilotes de s'aspirer... ou de se gêner mutuellement. L'embouteillage le plus ridicule se produit à la fin de la Q1 et donne lieu à des passes d'armes brûlantes, notamment entre Ocon et Räikkönen.

 

Hamilton s'empare facilement de la 94ème pole position de sa carrière (1'18''887'''), réalisée à 264,363 km/h de moyenne, un nouveau record. Bottas se classe second, à 69 millièmes de son coéquipier. Les Mercedes monopolisent la première ligne pour la sixième fois consécutive. Elles relèguent surtout la concurrence à huit dixièmes, ce qui démontre que l'interdiction des « modes fête » n'a aucune incidence sur leurs performances en qualifications. Sainz confirme l'excellente tenue des McLaren-Renault en arrachant la troisième place sur la grille. Son collègue Norris se classe sixième. Les Racing Point-BWT seront aussi redoutables: Pérez (4ème) vise ouvertement le podium et Stroll (8ème) n'est pas très loin en embuscade. Les Red Bull-Honda souffrent ici à la fois d'instabilité, à cause d'un manque d'appuis, et d'un déficit de puissance. Verstappen (5ème) sauve les meubles pendant qu'Albon (9ème) atteint péniblement la Q3.

 

Renault gère mal sa séance qualificative. Riccardo (7ème) est quelque peu déçu du comportement de sa RS.20 et traverse les graviers en Q2. Ocon (12ème) perd du temps dans le trafic puis ne peut pas bénéficier de l'aspiration de son coéquipier. Très rapides vendredi, les AlphaTauri (Gasly 10ème, Kvyat 11ème) rentrent dans le rang le lendemain à cause du manque de chevaux du V6 Honda. Ferrari n'échappe pas au désastre annoncé: si Leclerc (13ème) parvient avec effort à atteindre la Q2, Vettel (17ème) passe à la trappe dès la première session après s'être englué dans le trafic. Räikkönen (14ème) a la bonne surprise d'emmener son Alfa Romeo en Q2, et ce malgré une friction avec Ocon. Giovinazzi (18ème) est pour sa part aussitôt éliminé. Comme les Alfa, les Haas pâtissent du manque de puissance de leur moteur Ferrari. Curieusement, Magnussen (15ème) précède Grosjean (16ème) alors qu'il embarque plus d'appuis que ce dernier. Le Français accuse à demi-mots Haas de favoriser le Danois... Les Williams-Mercedes (Russell 19ème, Latifi 20ème) sont ici complétement hors du coup car leur charge aérodynamique les ralentit en ligne droite.

 

Le Grand Prix

En ce chaud dimanche de septembre, règne sur l'autodrome un silence assourdissant, celui des tifosi privé de Grand Prix pour cause d'hygiénisme. Les écrans géants installés en bord de piste pour diffuser les encouragements filmés par quelques fans dans leur salon ne pallient à cette cruelle absence d'ambiance. En attendant des jours meilleurs, les équipes planchent sur la stratégie à adopter. La majorité des coureurs prend le départ avec les pneus tendres (C4). Les Haas, les Alfa Romeo et les Williams sont chaussées de gommes médiums (C3), tandis que seul Kvyat part avec les gommes dures (C2).

 

Départ: Hamilton prend un bon envol, contrairement à Bottas qui cafouille quelque peu avec son système de démarrage. Le Finlandais est immédiatement dépassé par Sainz. Suivent Norris, Pérez et Ricciardo. Mal parti, Verstappen est seulement septième au premier virage. Albon entre en contact avec Gasly au freinage et doit traverser la chicane pour regagner la piste.

 

1er tour: Norris déborde Bottas par l'extérieur à la Variante della Roggia. Pérez puis Ricciardo dépassent ensuite le Scandinave entre Lesmo et la Variante Ascari. En fin de tour, Hamilton mène devant Sainz, Norris, Pérez, Ricciardo, Bottas, Verstappen, Stroll, Ocon et Gasly. Magnussen regagne son stand pour remplacer sa calandre endommagée lors d'une touchette au démarrage.

 

2e: Hamilton s'échappe assez aisément devant les McLaren. Bottas pense subir une crevaison mais son ingénieur l'informe qu'il n'en est rien. Stroll dépasse Verstappen à la première chicane. Grosjean tente de faire l'extérieur à Albon avant le premier freinage, mais le Thaïlandais se défend rudement en serrant le Français contre la bordure. La Haas y laisse un morceau de carbone.

 

3e: Le DRS est activé, ce qui permet à Verstappen de reprendre l'ascendant sur Stroll par l'extérieur à la première chicane. Le Hollandais escalade les vibreurs à cette occasion mais s'en tire sans peine.

 

4e: Deux secondes et demie séparent Hamilton et Sainz. Bottas met la pression sur Ricciardo. Albon tente de remonter bien que sa Red Bull ait subi des dégâts au départ. Il prend la 14ème place à Giovinazzi.

 

5e: Hamilton précède Sainz (2.8s.), Norris (4.8s.), Pérez (5.8s.), Ricciardo (6.4s.), Bottas (7.2s.), Verstappen (7.7s.), Stroll (9s.), Ocon (9.8s.), Gasly (10.4s.), Kvyat (11s.) et Räikkönen (12s.).

 

6e: Alors 17ème, Vettel perd l'usage de ses freins et tire tout droit à la première chicane, pulvérisant au passage des panneaux en polystyrène. L'Allemand garde néanmoins la maîtrise de sa Ferrari et rejoint ensuite les stands pour abandonner.

 

7e: Hamilton possède quatre secondes d'avance sur Sainz. Norris contient un trio comprenant Pérez, Ricciardo et Bottas.

 

8e: Albon reçoit une pénalité de cinq secondes pour sa manœuvre litigieuse sur Grosjean au deuxième tour. Il la subira lors de son arrêt pneus.

 

9e: Pérez se montre dans les rétroviseurs de Norris. Bottas rencontre du sous-virage et peine à suivre Ricciardo. Pis, il est menacé par Verstappen.

 

11e: Hamilton devance Sainz (6.8s.), Norris (10.6s.), Pérez (11.6s.), Ricciardo (12.4s.), Bottas (13.3s.), Verstappen (13.8s.), Stroll (14.7s.), Ocon (15.8s.) et Gasly (17s.). Treizième avec la Ferrari survivante, Leclerc ne parvient pas à suivre l'Alfa Romeo de Räikkönen...

 

14e: L'intervalle entre Hamilton et Sainz atteint neuf secondes. Norris a pris un peu de champ sur Pérez.

 

16e: Bottas peine de plus en plus à contenir Verstappen et peste contre une cartographie moteur qu'il estime peu adaptée à sa situation. En outre, il doit faire face à la surchauffe de quelques composants. Changement de pneus pour Latifi.

 

17e: Hamilton domine devant Sainz (11.6s.), Norris (17s.), Pérez (18.8s.), Ricciardo (19.6s.), Bottas (21.2s.), Verstappen (21.7s.), Stroll (23.4s.), Ocon (25s.), Gasly (27s.), Kvyat (27.7s.) et Räikkönen (29.5s.). Albon prend la 13ème place à Leclerc. Celui-ci stoppe au tour suivant pour prendre des enveloppes dures.

 

19e: Räikkönen passe chez Alfa Romeo afin de s'emparer de pneus durs. Trahi par son moteur, Magnussen s'immobilise dans la pelouse peu avant l'entrée des stands. Le drapeau jaune est agité à cet endroit. Gasly passe aux stands sur ces entrefaites afin de sélectionner des Pirelli durs.

 

20e: Michael Masi envoie en piste la voiture de sécurité, ce que la position de la Haas abandonnée ne justifie pourtant nullement. Hamilton apparaît aux stands alors que la pit-lane vient d'être close par la procédure de neutralisation. Le Britannique prend des pneus durs (3s.) puis rejoint la piste entre Sainz et Norris. Giovinazzi passe aussi par les stands tandis que le feu d'entrée est encore au rouge.

 

21e: Les bolides se rangent derrière la Safety Car. Sainz mène un Grand Prix pour la première fois de sa carrière. Magnussen aide les commissaires à pousser sa Haas vers l'allée des stands.

 

22e: L'accès à la pit-lane est de nouveau autorisé. C'est aussitôt la ruée de tous ceux qui ne s'étaient pas encore arrêtés. Sainz, Norris, Pérez, Ricciardo, Bottas, Verstappen, Ocon, Kvyat, Albon, Grosjean et Russell font escale à leurs boxes afin de chausser les pneus durs. Tous se font doubler par les pilotes qui avaient déjà stoppé. Seul Stroll demeure en piste et recueille ainsi la seconde place derrière Hamilton.

 

23e: Hamilton retrouve la première position mais est placé sous enquête par les commissaires pour son pit-stop illégal. Derrière l'Anglais évoluent Stroll, Gasly, Giovinazzi, Räikkönen, Leclerc, Latifi, Sainz, Norris, Bottas, Ricciardo, Pérez, Verstappen, Ocon, Kvyat, Russell, Albon et Grosjean. Pour corser le tout, la Safety Car s'efface à l'issue de cette boucle !

 

24e: Le drapeau vert est agité. Hamilton demeure devant Stroll et Gasly tandis que Leclerc double les deux Alfa Romeo dans la ligne droite principale. Räikkönen dépasse son équipier Giovinazzi dans la Curva Grande. Latifi cède devant les McLaren et la Mercedes de Bottas. Verstappen déborde Pérez au premier virage avec autorité. Le Mexicain endommage son fond plat et perd plusieurs positions dans cette mésaventure. Quelques instants plus tard, Leclerc perd le contrôle de sa Ferrari en sortant de la Parabolica: la Ferrari louvoie une fraction de seconde avant de filer comme une flèche dans la barrière de pneus. Elle s'y écrase avec une rare violence.

 

25e: La voiture de sécurité revient en piste. Leclerc s'extrait de son habitacle avec peine: il n'est pas blessé mais son souffle reste court devant la violence du choc encaissé. Les commissaires s'apprêtent à réparer les glissières de la parabolique, totalement démantibulées par cet accident. Hamilton et Giovinazzi écopent de dix secondes de pénalité pour avoir changé leurs pneus pendant que l'accès à la pit-lane était prohibé.

 

27e: Michael Masi brandit le drapeau rouge: le Grand Prix est interrompu afin de permettre aux préposés de travailler sereinement à la réparation des barrières de sûreté et retirent l'épave de Leclerc.

 

Les pilotes regagnent les stands pour y attendre un nouveau coup d'envoi. Hamilton profite de cette interruption pour se rendre à la tour de contrôle et obtenir des commissaires une explication quant à sa pénalité, car il est persuadé que l'allée des stands était ouverte quand il s'y est engouffré. Détrompé par les images vidéo, il reprend ensuite place dans sa Mercedes, comprenant qu'il a probablement perdu la course puisqu'il devra stopper aux stands pour supporter sa punition dès que celle-ci redémarrera. En outre, Stroll profite de cette neutralisation pour effectuer son unique changement d'enveloppes, sans perdre la moindre seconde, comme l'y autorise un point du règlement. Cet avantage quelque peu inique fait du Canadien le nouveau favori pour la victoire. Les autres pilotes remplacent aussi leurs gommes, et la plupart sélectionne des gommes médiums, à l'exception des Alfa Romeo et de la Renault d'Ocon, munies de pneus tendres, et d'Albon qui prend des durs.

 

Après vingt-cinq minutes d'interruption, les pilotes quittent les stands et reprennent la piste dans l'ordre suivant: Hamilton premier devant Stroll, Gasly, Räikkönen, Giovinazzi, Sainz, Norris, Bottas, Latifi, Ricciardo, Verstappen, Ocon, Kvyat, Pérez, Russell, Albon et Grosjean. Tous se rangent sur la grille pour un second départ.

 

Deuxième départ: Hamilton conserve la première place au redémarrage. Sans adhérence, Stroll est immédiatement débordé par Gasly, puis par les deux Alfa Romeo.

 

28e: Stroll tente de faire l'extérieur à Giovinazzi avant la Variante della Roggia. Serré contre la bordure par l'Italien, le jeune Canadien freine en catastrophe et doit court-circuiter la chicane. Il revient en piste entre Giovinazzi et Sainz. L'Espagnol le dépasse ensuite à Lesmo, mais Stroll reprend son bien à Ascari. Ricciardo, Ocon et Kvyat se défont de Latifi.

 

29e: Hamilton rejoint les stands pour subir son « stop-and-go » de dix secondes. Le champion du monde se retrouve lanterne rouge. Gasly est dorénavant premier devant Räikkönen et Giovinazzi. Sainz dépasse Stroll et se hisse au quatrième rang. Pérez déborde Latifi.

 

30e: Gasly devance Räikkönen d'une seconde et demie. Giovinazzi fait escale aux stands pour se plier à sa pénalité. Verstappen regagne son garage avec un moteur cafouillant. Le Hollandais met pied à terre et clôt ainsi un médiocre week-end. Son équipier Albon, piteux 14ème, fait de la figuration à cause de son plancher endommagé.

 

31e: Gasly est premier devant Räikkönen (1.9s.), Sainz (3.1s.), Stroll (4s.), Norris (5.3s.), Bottas (5.6s.), Ricciardo (6.8s.), Ocon (7.9s.), Kvyat (8.1s.), Pérez (9.1s.), Latifi (11s.) et Grosjean (12s.). Hamilton est quinzième, à vingt-sept secondes de Gasly.

 

33e: Les pneus tendres de Räikkönen s'effilochent rapidement. Sainz et Stroll fondent sur le Finlandais qui devient un bouchon très utile pour Gasly.

 

34e: Sainz dépasse Räikkönen à la Variante del Rettifilo. Seul au monde, Hamilton réalise le meilleur tour en course (1'22''746''') et reprend une seconde au tour à Albon qui le précède.

 

35e: Quatre secondes séparent Gasly et Sainz. Stroll fait l'extérieur à Räikkönen à la Variante della Roggia. Les roues des deux monoplaces se frottent dans la chicane, mais le Canadien en ressort devant le Finlandais.

 

36e: Norris laisse Räikkönen sur place dans la grande ligne droite. Le vétéran est ensuite pris en chasse par Bottas et Ricciardo.

 

37e: Sainz a repris une demi-seconde à Gasly. Bottas dépasse Räikkönen au premier freinage.

 

38e: Sainz revient à trois secondes de Gasly. Stroll évolue à cinq secondes du leader. Ces trois jeunes pilotes s'affrontent pour une possible première victoire en F1. Ricciardo efface Räikkönen.

 

39e: Gasly devance Sainz (3.2s.), Stroll (5.5s.), Norris (9.2s.), Bottas (10.3s.), Riccardo (11.1s.), Räikkönen (13s.), Ocon (13.9s.), Kvyat (14.8s.) et Pérez (15.5s.).

 

40e: Hamilton entame sa remontée et prend la quatorzième place à Albon.

 

42e: Gasly compte deux secondes et demie de marge sur Sainz, cinq secondes et demie sur Stroll. Bottas rencontre encore des surchauffes et ne peut pas menacer le quatuor de tête. Hamilton a successivement dépassé Russell et Grosjean.

 

43e: Ocon s'empare de la septième position aux dépens de Räikkönen.

 

44e: À moins de dix tours du but, l'excitation grimpe dans le stand AlphaTauri. Gasly fonce vers la victoire mais ses gommes se dégradent rapidement. Sainz grossit dans ses rétroviseurs. Kvyat déborde Räikkönen.

 

45e: Bottas évolue dans les échappements de Norris sans jamais pouvoir se porter à sa hauteur. Hamilton dépasse Latifi.

 

46e: L'intervalle entre Gasly et Sainz tombe sous les deux secondes. Chez McLaren, on se prend à rêver à une première victoire depuis 2012 ! Stroll, troisième, paraît désormais trop loin pour se mêler à cette bataille. Pérez puis Hamilton passent devant un Räikkönen en perdition à cause de ses pneus dégradés.

 

48e: Gasly est en tête devant Sainz (1.3s.), Stroll (4s.), Norris (8.7s.), Bottas (9.6s.), Ricciardo (11s.), Ocon (18s.), Kvyat (19.7s.), Pérez (22.7s.) et Hamilton (23.5s.).

 

49e: Gasly se bat comme un lion contre les vibrations générées par ses pneus endommagés. Par chance pour lui, les gommes de Sainz ne sont guère plus fringantes. Après trois tours de patience, Hamilton vient à bout de Pérez et se saisit de la neuvième place.

 

51e: Gasly conserve un peu plus d'une seconde d'avance sur Sainz. Plus loin, Norris résiste toujours à Bottas. Hamilton prend l'ascendant sur Kvyat. Ocon est sa prochaine cible.

 

52e: Sainz appuie sur le champignon dans l'espoir de bénéficier du DRS dans l'ultime tour et de chiper ainsi la victoire à Gasly. Latifi puis Grosjean vont doubler Räikkönen.

 

53ème et dernier tour: Sainz entame cette dernière boucle quelques dixièmes derrière Gasly. Il peut donc actionner son aileron arrière mobile. Mais, grâce à une meilleure traction, Gasly sort des virages plus facilement que son poursuivant et se prémunit ainsi de tout assaut de dernière minute.

 

Pierre Gasly remporte sa première victoire avec quatre dixièmes (!) de seconde d'avance sur la McLaren de Sainz. Stroll finit troisième avec sa Racing Point-BWT. Norris se classe quatrième. Bottas achève une course éprouvante à la cinquième place. Ricciardo finit sixième: un résultat décevant pour Renault. Hamilton prend la septième place à Ocon dans les derniers kilomètres. Les dernières places d'honneur reviennent à Kvyat et à Pérez. Coupent aussi la ligne d'arrivée: Latifi, Grosjean, Räikkönen, Russell, Albon et Giovinazzi.

 

Après la course: Gasly, 24 ans après Panis

Ce 6 septembre 2020, la Marseillaise retentit pour saluer la victoire d'un pilote tricolore, une première depuis le 19 mai 1996 et le succès d'Olivier Panis à Monaco sur Ligier-Mugen-Honda. Pierre Gasly avait alors... trois mois ! La France aura donc patienté 24 ans avant de découvrir un nouveau vainqueur en Grand Prix. Certes, Gasly, comme Panis jadis, a profité de circonstances exceptionnelles pour l'emporter: un changement de pneus juste avant la neutralisation, une erreur de Mercedes et de Lewis Hamilton, un redémarrage manqué par Lance Stroll. Mais encore fallait-il saisir cette opportunité et résister au retour de Carlos Sainz Jr. !

 

Le Normand peine à réaliser ce qui lui arrive. « Je n'ai pas eu un instant à moi... J'ai dû avoir trois secondes depuis l'arrivée pour appeler ma mère, c'est tout ! » lâche-t-il au correspondant de L'Équipe, avant de lui narrer sa course: « Juste après mon arrêt, j'ai vu entrer en piste la voiture de sécurité. J'ai cru que c'était une blague, que tout était foutu ! Jusqu'à ce que mon ingénieur m'avertisse que la voie des stands venait de fermer. Là, j'ai pensé qu'il y avait quelque chose à faire, mais je me voyais seulement finir sur le podium, derrière les Mercedes. Puis, Hamilton a subi sa pénalité. J'ai alors attaqué pour me donner trois ou quatre secondes de liberté, afin de ne pas offrir d'aspiration. Donc, quitte à cramer mes pneus, j'ai poussé comme un fou pour me mettre à l'abri de Sainz. Sans aspiration, je perdais 5/10e dans les lignes droites: il fallait donc que je gagne 5/10e en virage. Mais à la fin, j'étais sur les jantes. J'ai pris des « équerres » dans Ascari et dans Lesmo... Lors du dernier tour, je savais que Sainz ne pouvait passer qu'en tentant une attaque téméraire ou en prenant une grosse aspiration. J'ai donc économisé mes batteries pour me couvrir avant la seconde chicane. Après, j'étais tranquille. »

 

Pour Gasly, cette première victoire en F1 est une remarquable récompense. Le natif de Rouen a en effet fait montre ces derniers mois d'une résilience remarquable. Rappelons qu'un an plus tôt, en août 2019, il fut brutalement évincé par Red Bull suite à une demi-saison médiocre, avant de perdre son camarade Anthoine Hubert, tué à Spa-Francorchamps. Bien d'autres auraient perdu leur motivation après de si cruelles épreuves. Pas ce jeune garçon au mental d'acier, animé dès sa prime enfance d'un besoin quasi-compulsif de perfection et de réussite. Ses aînés français sont très fiers qu'il leur succède au palmarès. « Pierre a géré sa fin de course comme un vrai pilote de Grand Prix, sans s'affoler, sans un blocage de roue. Il a saisi une opportunité, mais c'est souvent ainsi que l'on gagne un premier Grand Prix », souligne Jacques Laffite, qui sait de quoi il parle. « J'en avais assez d'être le dernier Français vainqueur en F1 ! » s'écrie joyeusement Olivier Panis. « Pierre mérite vraiment ce succès, cela va donner un nouvel élan à sa carrière et lui ouvrira les portes d'un top team. » Alain Prost, qui a assisté à la cérémonie du podium en compagnie de Romain Grosjean, ne cache pas une certaine émotion: « Entendre la Marseillaise m'a presque tiré une petite larme ! » s'exclame le quadruple champion du monde, qui couvre ensuite le vainqueur de louanges: « Gasly s'est reconstruit depuis 2019. Il a mûri, est plus serein, pas du tout écorché vif. Sa victoire fait vraiment plaisir ! »

 

Par cette victoire-surprise, la « petite scuderia » de Faenza, ex-Minardi, ex-Toro Rosso, rebaptisée cette saison AlphaTauri, renoue les fils du passé: c'est en effet ici-même à Monza que douze ans plus tôt, en 2008, sous des trombes d'eau, elle remportait son premier Grand Prix grâce à un certain Sebastian Vettel. Ce succès permet de mettre en lumière cette sympathique écurie, trop souvent réduite à son statut de « Junior Team » (ou plutôt de « voie de garage ») de la filière Red Bull. C'est oublier que contrairement à d'autres structures AlphaTauri est encore un vrai constructeur, capable d'innover et même d'inspirer son « écurie-mère » sur le plan technique. Du reste, cette victoire italienne lors du Grand Prix national atténue quelque peu le désarroi des tifosi, désespérés par le naufrage de Ferrari. Comme Pierre Gasly réside à Milan, les Italiens s'attribuent sans vergogne sa victoire: « L'Italia trionfa con l'AlphaTauri del Milanese Gasly » titre la Gazzetta dello Sport !

 

Sainz, Stroll et les autres

Il n'a probablement manqué qu'un seul tour à Carlos Sainz pour qu'il puisse dépasser Pierre Gasly et remporte ainsi son premier Grand Prix, ce qui aurait été aussi, accessoirement, la première victoire de McLaren depuis huit ans. Évidemment déçu, le Madrilène rend néanmoins hommage à son vainqueur. « Mes pneus étaient usés et j'étais un peu en souffrance aussi », raconte-t-il. « Mais j'avais un rythme incroyable. J'avais l'impression de pouvoir gagner. Puis, une fois que je suis revenu à une seconde et demie de Gasly, je me suis retrouvé coincé. L'aspiration génère aussi de l'air sale qui a affecté ma motricité et ma qualité de freinage. J'ai subi du survirage et j'ai commis quelques mini-blocages de roue. À la fin, nos pneus étaient si usés que je me croyais en rallye. Mais Gasly a fait un travail de défense extraordinaire et je n'ai rien à redire. Évidemment, sans le drapeau rouge, j'aurais sans doute gagné... »

 

Le troisième larron de ce podium inédit, Lance Stroll, peut aussi se mordre les doigts: s'il n'avait pas manqué son deuxième départ, il aurait probablement remporté la course, et ce grâce à une règle assez contestable qui lui a permis de changer ses pneus durant la neutralisation, et donc de se passer de tout arrêt aux stands. Cet avantage est d'ailleurs contesté par Lando Norris qui estime que Stroll a en quelque sorte « volé » sa place sur le podium qui, en bonne logique, aurait dû revenir au dénommé Norris Lando...

 

Pour la première fois cette saison, Mercedes ne place aucune voiture sur le podium. Toto Wolff n'est pas vraiment chagriné puisqu'il se dit content d'avoir vu du beau spectacle en piste ! Lewis Hamilton reconnaît pour sa part avoir commis une erreur en pénétrant trop tôt dans la pit-lane et se contente de féliciter chaudement le jeune Gasly. Le sextuple champion du monde n'est pas inquiet: grâce à l'abandon de Max Verstappen, il accroît encore son avance au championnat du monde ! Son dauphin est désormais un Valtteri Bottas plus amer que jamais: après avoir manqué son départ, des surchauffes incessantes l'ont empêché de briller. Incontestablement, le Finlandais traverse une mauvaise passe. Beaucoup remarquent d'ailleurs que chaque année ses performances s'affaissent après la prolongation de son contrat...

Tony