Réalisé par Jerzy Skolimowski. Belgique. Comédie dramatique. 2h280 (Sortie le 21 novembre 2018 version restaurée - 1ère sortie décembre 1967). Avec Jean-Pierre Léaud, Catherine-Isabelle Duport, Paul Roland, Jacqueline Bir, Georges Aubre, Lucien Charbonnier et Leon Don. Jerzy Skolimowski a fêté ses 80 ans cette année. Malavida Films a eu la bonne idée d'en profiter pour ressortir "Le Départ", son premier film non-polonais, tourné à Bruxelles en 1967.
C'est un film tout en "jamais"... Jamais Jean-Pierre Léaud n'a été aussi bien en excité obsédé par la course automobile. Jamais, hélas, on ne reverra sur un écran Catherine Duport, sa solaire partenaire.
Jamais quelqu'un n'aura, comme Skolimowski, appliqué aussi magnifiquement les recettes de la "Nouvelle Vague" au point de peut-être faire ici le plus beau film, voire l'unique film, vraiment "Nouvelle Vague", tourné sans grands moyens et en quelques jours.
Jamais le compositeur polonais K.T. Komeda n'aura été aussi inspiré par un film depuis "Le Couteau dans l'eau" de Roman Polanski.
Bref, "Le Départ" de Jerzy Skolimowski n'a pas pris une ride en cinquante ans.
L'histoire de ce garçon coiffeur qui veut piloter une Porsche 911 S est l'occasion de virées jazzystiques, de scènes saugrenues tournées en toute liberté et exaltant une espèce de couple de Bonnie dans Clyde totalement inoffensif.
La scène finale dans la chambre d'hôtel, où le magnifique noir et blanc de Willy Kurant (qui sortait comme Jean-Pierre Léaud de "Masculin Féminin" de Godard) tend au sublime, est d'une rare beauté. Elle est le chaînon manquant entre "A bout de souffle" de Jean-Luc Godard et "Boy meets girl" de Léos Carax.
Ce dernier a d'ailleurs dû le voir de nombreuses fois "Le Départ" de Skolimowski, car on retrouve tout au long du film de futurs plans "caraxiens". Plagiat par anticipation, comme aurait dit Pierre Bayard, mal compris en France malgré son Ours d'Or à Berlin, a été paradoxalement compris et réhabilité grâce justement à une critique biberonnée par "Boy meet girls" et "Mauvais sang".
On n'oubliera pas la scène, mi prude mi osée, dans la voiture avec Jacqueline Bir, cette merveilleuse comédienne belge qu'on a pu voir il y a deux ans au théâtre à Paris, à la Pépinière, dans "Conversations avec ma mère".
Toutes les scènes entre Catherine Duport et Jean-Pierre Léaud sont aussi mémorables, comme celle où ils se sont enfermés dans le coffre d'une voiture pour rester toute la nuit au Salon de l'auto de Bruxelles.
Dernière bonne nouvelle, Malavida prévoit l'an prochain de ressortir "Walkower", sans doute le plus beau film polonais de Skolimowski qui mérite amplement de quitter le purgatoire consécutif à l'échec de "Ferdydurke".
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