Institution vieille de 172 ans, Drouot se met à l’heure du NFT ! La maison de vente aux enchères dévoilera ce jeudi 4 avril une vente hybride d’art urbain et d’œuvres NFT : une première pour la plateforme. En France, la galerie FauveParis l’avait précédée en 2022 et les mastodontes du secteur Christie’s et Sotheby’s s’en sont tour à tour emparé. Il a fallu l’abnégation d’un homme, Jean-Marc Scialom, pour que cette vente intitulée «Hacking Painting» voit le jour dans le quartier du Peletier. Un vœu insufflé dès 2018 par cet expert en art urbain et courtier indépendant. «Depuis 2018 et ma découverte de la place de marché NFT Rarible, je voulais faire quelque chose avec les NFT, raconte Jean-Marc Scialom. Fort de mon expérience, la maison Blanchet & Associés - qui fait partie du groupe Drouot - m’a donné carte blanche mais cela correspond à un travail de deux ans pour la mettre en œuvre.»

Pour cette vente, Jean-Marc Scialom a en effet souhaité tracer un trait d’union entre l’art urbain et l’art numérique NFT, estimant que ces deux cultures partagent un langage commun. «L’un comme l’autre existent hors des galeries et des musées, même si le Centre Pompidou en a récemment acquis, développe-t-il. De plus, les deux s’appuient sur l’écriture : le NFT est en soit le résultat du code tandis que l’art urbain s’exprime primairement à travers l’écriture - le graffiti. Entre ces deux cultures, la logique est la même : on parle d’art hors de l’institution.»

Des œuvres estimées entre des centaines et des dizaines de milliers d’euros

Pour la sélection NFT, l’expert a pioché dans des œuvres en provenance de collections privées mais s’est aussi associé à certains artistes, désireux de proposer des œuvres exclusives, à l’instar de l’artiste français Louis-Paul Caron. Il en va de même pour l’artiste Systaime, qui a créé une œuvre pour célébrer le «halving», cette division automatique à intervalles réguliers de l’émission de bitcoin qui interviendra mi-avril. «C’est une œuvre qui est censée marquer la vente : nous aimerions qu’elle soit cédée symboliquement au prix d’un bitcoin», soit environ 62 000 euros au 3 avril. Et si certains artistes ne sont pas exclusifs aux NFT, à l’image de J.R, Refik Anadol ou Sophie Lavaud, la majorité de la collection provient de créateurs représentatifs de cette culture, comme les pionniers Robness et Pascal Boyart, le plasticien numérique Agoria ou l’artiste conceptuel Kevin Abosch.

Derrière cette sélection, Jean-Marc Scialom assume de vouloir «apporter le NFT au public traditionnel de l’art contemporain. C’est encore un défi, notamment pour Drouot, d’où l’intérêt de faire une vente mixte et conjointe avec l’art urbain. Je pense que l’on a trouvé l’angle d’attaque.» Diffusée en ligne sur la plateforme Drouot.com, la vente ciblera tous les portefeuilles puisque certaines œuvres seront mises aux enchères à partir de quelques centaines d’euros, tandis que d’autres sont évaluées à plusieurs dizaines de milliers d’euros. Mais si l’expert espère évidemment «vendre des œuvres», il assure «n’avoir aucune attente économique» : «Au risque de surprendre, c’est une vente que je réalise car c’est un sujet qui me passionne. C’est une forme d’art qui m’intéresse beaucoup car je la considère comme un support de liberté d’expression pour les artistes.» Le public sera-t-il au rendez-vous ? Réponse connue ce jeudi 4 avril à partir de 14h30.

Des résultats de vente très décevants

A l'issue de la vente, les résultats n'étaient pas ceux escomptés par le curateur puisqu'au sein du segment NFT, seule l'œuvre "Comp-ND" d'Agoria a été adjugée. «Une douche froide» reconnaissait Jean-Marc Scialom, d'autant que, d'après nos informations recueillies auprès de la maison de vente, le processus a été entaché par des erreurs de saisie du cyberclient de Drouot.com, qui ont laissé penser de nombreux observateurs que la plupart des œuvres avaient été acquises. Celles-ci ont été rectifiées au terme de la vente aux enchères. En revanche, plusieurs d'œuvres d'art urbain ont bien été adjugées.